Cho Seung-Hui, 23 ans incompris

Un article du Washington Post détaille qui est Cho Seung-Hui, le tueur de l'université Virginia Tech.
En entandant les "on ne savait pas qu'il avait un problème", "on ne pouvait pas imaginer qu'un jour...", on réalise qu'il y a là justement un gros, gros problème.




Cho en 1998

L'article relate le parcours de Cho. Il est arrivé à 8 ans aux USA, avec sa famille qui vivait auparavant dans la quasi misère, habitant dans un appartement minable dans un sous-sol de Séoul. Ces gens sont venus chercher aux USA la fortune, et la rédemption par leurs enfants. Si le père travaillait 6 jour sur 7 dans un pressing sans prétention, il se réjouissait de la réussite scolaire de ses enfants, et plus spécialement de sa fille, Kim.
Car du fils, il en était peu question. A sa famille, la mère ne parlait que de Kim, éludant le sujet. Cependant elle le considérait autiste, et il y avait effectivement des raisons à cela : Cho était dans un monde à part, ne parlait pas à ses camarades, ne répondant pas aux professeurs, refusant tout câlin, mais se défoulait violemment lorsqu'il chahutait avec sa soeur.
Il grandit ainsi sans lien social avec personne, et au milieu des moqueries, les autres enfants allant jusqu'à parier sur le fait que ce jour-ci, il ne parlerait pas, une fois de plus.

Certains de ses pairs de Virginia Tech ont même découvert le son de sa voix sur les vidéos que Cho a envoyé à la presse. Certains ont même remarqué que c'était la première fois qu'ils voyaient une expression sur son visage.
Cela faisait 23 ans que Cho ne parlait pas, scolairement performant mais socialement inadapté, et pourtant jamais traité !

Il semble que la culture coréenne ait du mal à reconnaître les handicaps mentaux, et y associent une certaine honte. Toute la famille de Cho a donc zappé ce garçon étrange, les copains de Kim, les collègues du père ont découvert à l'occasion du drame l'existence de Cho. Par ailleurs, la famille s'est aussi repliée sur elle-même, ne participant à aucune activité des Coréens exilés aux USA, communauté volontiers solidaire.
Une famille de fantômes, tous travailleurs forcenés, l'un plus forcené que les autres...
Une famille où la fille faisait la fierté, et le fils la honte...

Du côté de ses professeurs de Virginia Tech, Cho a réussi à susciter un certain émoi prémonitoire. Une des profs ne voulait plus de Cho dans son cours, il lui faisait peur. Il était suivi donc en particulier par une autre prof, si inquiète qu'elle avait décidé d'un mot-clef pour que son assistante téléphone au besoin à la police, si un entretien avec Cho prenait un tour inquiétant.
Cho a fini par faire l'objet d'un bilan psychiatrique, mais relâché car ne présentant pas de danger pour les autres, selon les experts.
Au-delà du cinglant démenti que Cho en donna, on observe ici toute la misère d'un garçon qui n'a jamais été compris, et dont les seuls moyens d'expression ont été écartés : alors qu'il ne parlait pas, il écrivait des pièces de théâtre qui donnaient accès à son ressenti intérieur, une lucarne sur sa rage et sur son malaise. Les gens s'en sont détournés. Jusqu'au moment où la fuite n'était plus possible...



L'article du Washington Post :
http://www.washingtonpost.com/wp-dyn/content/article/2007/04/20/AR2007042002366.html?nav=hcmodule

Un article qui analyse les pièces de théâtre de Cho :
http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3232,36-899636,0.html

texte annexe sur le dossier médical de Cho :

Citation :

Dans son rapport, daté du 14 décembre 2005, l'expert médical attribue notamment à son patient le profil de "mentalement malade, mais ne présente pas un danger imminent pour lui et pour les autres à cause de sa santé mentale". Il le décrit comme un être "incapable d'émotion", d'"humeur dépressive", "qui ne reconnaît pas les symptômes d'un désordre profond".
Le magistrat qui suivait l'affaire, estimant pour sa part que Cho Seung-hui représentait probablement un danger pour lui-même et pour les autres, avait recommandé qu'il soit soumis à une évaluation au Carilion St. Albans, une clinique psychiatrique.

Selon l'agence AP, qui cite des archives judiciaires, les médecins de cette institution ont jugé que le jeune homme n'était pas suicidaire et que son niveau de ''compréhension et son jugement étaient normaux''. La justice a dès lors conclu qu'il représentait un danger imminent pour lui-même mais pas pour autrui, et a approuvé un traitement en consultation externe, solution de remplacement à l'internement.

http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3210,36-898375,0.html?xtor=RSS-3208