Gratuité des transports aux RMIstes en IDF : les critiques

La gratuité des transports offerte aux Rmistes d'Ile-de-France concerne 350.000 personnes - 228.000 bénéficiaires du Rmi et leurs ayants-droit.

Les Rmistes avaient déjà droit à une réduction de 75% du prix des transports depuis le 1er octobre 2006, au même titre que les bénéficiaires de la CMU et de l'AME (santé), l'ASS (allocation spécifique de solidarité) et l'API (parent isolé), soit un potentiel d'un million de Franciliens et un nombre de bénéficiaires à fin février de 400.000.

En année pleine, le coût de ces deux dispositifs est évalué à 87 millions d'euros.

Fausse bonne idée donc que de proposer la gratuité totale ? Même les associations donnent un accueil mitigé. Et les critiques pleuvent :

Citation :

La gratuité des transports, surtout en Ile-de-France où leur coût peut s'avérer très élevé pour les habitants de la grande couronne, est à priori une bonne nouvelle.

"On reçoit dans nos permanences trop de gens qui hésitent à se déplacer ou sont contraints de frauder, cela va permettre aux Rmistes d'être des citoyens comme les autres", constate Julien Lauprêtre, président du Secours populaire.

Mais les associations évoquent le risque d'inégalité de traitement et d'injustice notamment envers les moins de 25 ans (qui n'ont pas droit au RMI) et les "travailleurs pauvres".

"Il y a une inégalité avec les travailleurs précaires, les jeunes de moins de 25 ans", affirme la présidente de la Fnars (associations de réinsertion), Nicole Maestracci, ajoutant : "ce n'est pas parce que ce n'est pas parfait qu'il ne faut pas le faire".

ATD-Quart Monde aurait clairement préféré, dit sa déléguée générale Véronique Davienne, une "revalorisation des minima sociaux". Accorder des aides en fonction du statut "crée des clivages", dit-elle, "nous préférerions des aides accordées en fonction des ressources, en utilisant par exemple le quotient familial".

L'inégalité entre régions est mise en avant par Gilbert Lagouanelle, du Secours catholique, qui évoque le coût du transport en zone rural.

Le président d'Emmaüs-France, Martin Hirsch, estime même que la gratuité, "une mesure qui part d'un bon sentiment", peut être "contre-productive", car "lier une prestation sociale à un statut d'inactivité peut être dangereux". Il suggère lui aussi "un dispositif progressif, non pas lié au statut mais aux ressources".

La droite également est réticente à cette mesure, qui conforte l'assistanat.

http://www.orange.fr/bin/frame.cgi?u=http%3A//actu.orange.fr/articles/France/Gratuite-des-transports-aux-Rmistes-une-fausse-bonne-idee-.html


Pour ma part, une petite question : pourquoi un RMIste a-t-il le droit implicite de frauder (témoignage d'un homme qui est d'ailleurs passé aux infos), et pas les sans papiers ?
Dixit le secours pop' : ""On reçoit dans nos permanences trop de gens qui hésitent à se déplacer ou sont contraints de frauder"...

Les sans papier non pas le droit de frauder parce qu'ils ne sont pas Français, et qu'ils ne devraient même pas être en France.

Les RMIstes sont contraints de frauder parce que tu ne peut pas payer ta carte orange 5 zones 25 € et en même temps payer ton forfait de téléphone mobile. Or comme tu ne peut pas gruger sur la facture de ton mobile, c'est impossible, tu es donc contraint de frauder la seuneuceufeu.

CQFD

Une réponse mathématique, basée sur les probabilités :

Citation :

Sur la ligne SNCF régionale que j'emprunte très régulièrement depuis plus d'un an, et qui est assez fréquentée, je n'ai vu que rarement un contrôleur effectuer un contrôle des billets. Sur les TGV grandes lignes, que j'emprunte plus rarement, il est bien rare qu'on ne me demande pas mon titre de transport.
Est-ce bien logique?


Les usagers des lignes régionales sont pour la plupart des voyageurs
réguliers qui font le trajet plusieurs fois par semaine, pour aller au travail,
au lycée, .... Ils n'auront donc pas manqué de constater que
les probabilités de contrôle sur la ligne sont extrêmement faibles, et ils sont
donc a priori incités à frauder. Il semblerait donc logique que les contrôles
soient plus fréquents sur les lignes régionales. En revanche, les voyageurs
grandes lignes sont plus souvent des voyageurs ponctuels, qui partent en
vacances ou font un voyage d'affaires. Ils n'ont pas moyen de connaître la
probabilité de contrôle et, étant généralement peu enclins au risque, paieront leur billet. La SNCF pourrait donc quasiment supprimer les contrôleurs sur ces grandes lignes, comptant sur la non-répétition du jeu et sur l'incertitude du voyageur qui en résulte pour que chacun paie sa place.

Mais l'organisation de la SNCF n'est peut-être pas si inefficace que ça. En
effet, le voyageur régulier de la ligne régionale sait qu'il a une probabilité
certes faible, mais réelle, d'être contrôlé. Or le prix du billet régional,
souvent de courte distance, est faible comparé aux 15€ (ou 38€ si le paiement est différé) d'amende administrés en cas de fraude (ajoutés au prix du billet).
En raison de l'aversion au risque, il n'est pas prudent de risquer 20€ au lieu des 5€ qu'aurait coûté le billet : la fraude fait courir le risque de voir
le prix du voyage augmenter de 300%. A l'inverse, sur une grande ligne, même si la probabilité de contrôle est forte (bien qu'inconnue du voyageur), le voyage passerait de 30€ à 45€ en cas de fraude, soit une augmentation de 50%.

Vous allez me dire qu'il est stupide de raisonner en pourcentage, et que seule compte la valeur absolue de l'argent perdu par le voyageur. Certes... mais D.Kahneman a montré que cette attitude irrationnelle était largement répandue. Un individu est prêt à faire 20km pour aller acheter une machine à laver 100€ moins cher qu'à côté de chez lui, mais une voiture vendue 100€ moins cher ne l'aurait pas fait se déplacer. Le gain absolu aurait été le même, mais l'individu raisonne instinctivement en proportion.

On peut donc penser que le voyageur régional a une aversion au risque et que la répétition du jeu le poussera à ne pas frauder, malgré l'absence de contrôle régulier, ce qui justement permet ce faible contrôle. En revanche, le voyageur grande ligne estime que le risque (exprimé en taux de variation du prix de son billet) est faible, ce qui peut le pousser à frauder et force la SNCF à contrôler fortement ces trajets.



Kahneman pose que les actions des individus réagissent (en partie) à des
mécanismes psychologiques qu'on peut qualifier d'irrationnels, ce qui pourrait être le cas de nos voyageurs - et donc de la SNCF. Qu'en disent les chiffres?

Premier cas : un individu voyageant sur une ligne régionale a remarqué que le contrôleur passait en moyenne une fois sur les 10 trajets hebdomadaires qu'il effectue (5 allers-retours). En fraudant, le coût moyen de son trajet est donc de ((1/10)*20+(9/10)*5)=6,5€, soit +30% par rapport au coût moyen du trajet sans frauder. Deuxième cas : un individu voyageant sur une grande ligne, ignorant les probabilités de contrôle mais les estimant à 90%, voit son coût moyen en fraudant s'établir à ((9/10)*45+(1/10)*30)=43,5€, soit +45% par rapport au coût moyen sans frauder. Si les voyageurs estimaient mathématiquement leurs risques, le voyageur grande ligne paierait plus souvent sa place que le voyageur régional, et la SNCF devrait revoir sa stratégie de contrôle.

Mais ce raisonnement est incomplet : en effet, les amendes des
récidivistes sont rapidement majorées, et les multi-récidivistes risquent de
gros ennuis. Il semble donc que ce soit bien la répétition du jeu qui provoque la légitime et finalement rationnelle aversion au risque du voyageur régional.
La SNCF a donc raison de limiter ses contrôles sur ces lignes. Le voyageur
occasionnel grandes lignes peut être bien plus enclin à tenter un "coup de
poker", qui a quand même une probabilité de 10% de marcher, et qui lu fera alors économiser 30€. Il sera donc plus fraudeur, et la SNCF a raison de renforcer ses contrôles sur ces lignes.

Il manque encore un denier aspect à ce raisonnement (enfin, certainement plus, vous ne manquerez pas de me le signaler en commentaires, chers lecteurs) :
celui lié aux probabilités conditionnelles; ceci ne s'applique qu'au voyageur
régional. En effet, si le constat est toujours "en moyenne un contrôle sur les 10 trajets hebdomadaires", la bonne stratégie consiste à payer son billet jusqu'au trajet où le contrôleur passe. A partir de ce moment, le jeu change, et le nouvel énoncé est "en moyenne un contrôle sur les 10 trajets
hebdomadaires SACHANT QUE le contrôleur est passé ce matin". La probabilité de contrôle chute alors fortement, et il devient mathématiquement rationnel de ne plus payer son trajet. Je vous vois venir : faire passer le contrôleur plus souvent le vendredi ne changera rien, les voyageurs en déduiront que le risque est réduit en début de semaine et frauderont au moins jusqu'au mercredi.
La SNCF tentera alors de provoquer la plus forte incertitude possible chez le voyageur en déterminant les jours de contrôle de façon la plus imprévisible possible.

Alors, la SNCF a-t-elle raison de contrôler les grandes lignes bien plus que
les lignes régionales ? Il semble que oui, mais l'élément déterminant me
paraît être l'aggravation des sanctions prononcées à l'encontre des
multi-récidivistes, qui crée une incitation telle qu'il devient rationnel pour
le voyageur régional de ne pas s'exposer au risque croissant lié à la
répétition du jeu. Par cette organisation, la SNCF arrive probablement à
minimiser le nombre de passagers clandestins impunis.

EDIT - L'ensemble de ces inepties repose sur le postulat hasardeux que
l'amende SNCF est forfaitaire, information trouvée
ici : http://www.egide.asso.fr/fr/guide/vivre/conseils/ mais que je n'ai guère pris la peine de vérifier et qui peut tout à
fait être fausse...

http://www.optimum-blog.net/feed/category/Reflexions-ou-tentatives/rss2

Citation :

EDIT - L'ensemble de ces inepties ...

Bien d'accord...

Je préfère ma réponse à moi, na !

Vexé ?

Forcément, mais pas pour ce que tu crois

Il est vrai que l'explication piratesque est la plus évidente : on fraude partout où c'est possible en France. Si par exemple, on pouvait se servir à la station essence, et payer quand on a envie, et spécialement quand on est contrôlable, le paiement étant par ailleurs basé sur la confiance, ces paiements seraient plutôt rares...

Le tout étant de savoir ce que l'on veut.

Pour contrôler tout le monde, et avoir ainsi 0% de fraude, il suffirait de mettre un contrôleur à chaque zone de portiques de métro, par exemple.
Dès lors, personne ne passerait plus par dessus (ou dessous), la simple présence d'un officiel l'empêchant (la plupart du temps).
Par contre, cela reviendrait cher... très cher...

Donc on fait des économies, en employant moins de monde (et le chômage, alors ?), mais on rend le contrôle moins efficace par la même occasion.


Mais dans ce thread, me semble-t-il, le sujet n'est pas tant au niveau du contrôle et de la fraude, que dans l'inégalité intrinsèque au fait d'établir la gratuité des transports pour certains et pas pour d'autres, qui se sentent donc laisés.

Mais pourquoi ces mêmes personnes se sentent-elles laisées de payer leurs titres de transport ?
Parce qu'ils sont envieux. Ils envient la gratuité des transports qu'ils n'ont pas.
Pourquoi n'envient-ils pas aussi l'absence de travail et le RMI comme seul revenu ???

Ca, je me demande bien pourquoi...

ça se calcule tout ça. Il est clair que travailler fait sauter des aides, malgré l'effort, et il est donc compréhensible que ceux qui peinent envient ceux qui ont des "privilèges" sans rien faire.
Mais en même temps, le discours est souvent ambivalent : les travailleurs revendiquent s'en sortir par eux-mêmes sans recourir à l'assistanat, mais ne trouvent pas assez de réconfort dans la fierté qu'ils en tirent pour ne pas envier tout de même les autres, qui ont fait d'autres choix (pour autant que ce soit un choix d'être RMIste).
L'envie est certes ce qui ronge les hommes. Dommage que cette envie, associée à de la colère, s'exprime ici à l'égard des plus pauvres que soi, alors que ceux qu'il "faudrait" vraiment envier (= qu'il serait compréhensible d'envier), ce sont les plus riches.